Préface d'Alain Coudert        

MiA   

Cette force qui peint

Alain, philosophe un peu oublié de nos jours mais dont la pensée reste immortelle, écrivait :
 « La peinture est une cérémonie en solitude». Cette observation s’applique parfaitement au travail imposant de MiA, artiste complète qui, parallèlement à sa peinture, écrit, joue de la musique (piano et violoncelle) et ne déteste pas fréquenter les scènes théâtrales.

Voilà des tableaux qui ne laisseront personne indifférent ! Après avoir beaucoup pratiqué l’aquarelle à la Dufy, MiA a, peu à peu, fait disparaître les figures de sa peinture. Le sujet n’est pas l’important de son tableau. Il est souvent relégué à un simple titre, décliné en variantes : l’artiste travaille par séries. Elle nous offre ainsi « Mouvance carmin », « Mouvance givre », « Mouvance passion », « Mouvance turquoise », « Mouvance soleil »… 

Là où le poète et le philosophe usent des mots, MiA cultive la couleur. « Je peins depuis toute petite, se souvient-elle. L’un de mes grands souvenirs d’enfance est la couleur des cerises à travers le soleil de mon jardin… J’ai toujours été attirée par la couleur. Je me souviens de ma première boîte de couleurs : c’était le ciel tout entier qui venait à moi. »

Le ciel de MiA est constellé d’orages. Cette peinture traque le sentiment sans encombre ni fioriture. C’est fort, brutal, parfois sauvage, captivant en tout cas pour qui s’intéresse à l’humain très humain. Nous sommes loin de l’impression doucereuse à poser sur un mur. Petites natures, passez votre chemin ! Nous sommes dans le trouble revendiqué, la passion subie et vécue. « Dans l’écriture est mon amour » proclame MiA poétesse (Des cris et des étoiles). La force vitale – tout comme la fascination de la mort sa cousine – habitent cette peinture. Les tableaux de MiA, sont beaucoup plus que de la matière habilement jetée sur une toile. Il s’agit des lambeaux mêmes de sa chair et de fragments de son esprit qui hurlent les affres et les joies de l’existence, une autre forme d’écriture. Rarement peinture n’a été aussi puissamment sonore !

MiA vit-elle de son art ou son art lui permet-il de vivre ? La réponse n’est pas tranchée.

Depuis, les éléments se sont déversés sur ses toiles. « Je reviens de loin, admet-elle. Je suis à l’intérieur de moi toutes griffes dehors. La violence qui est en moi m’a aidée à trouver la lumière. Je n’ai pas eu le choix : j’ai été sauvée de l’enfer par la création. Je suis presque reconnaissante de la souffrance apprise : elle m’a fait comprendre celle des autres. J’aurais pu être aigrie. » L’acte de créer l’attire vers la lumière, la maintient en équilibre. Mieux vaut l’équilibre, même instable, de la vie, que l’enfer du chaos. « Aujourd’hui, dit-elle, je commence à trouver le début, le fil de quelque chose. Ce sont des prémices, les premiers cris de tableaux libres. » Quand peindre c’est vivre, on comprend l’importance du mouvement, du rythme, dans cette peinture. MiA ne différencie pas sa vie de sa peinture. « Les tableaux sont en moi. S’ils doivent vivre, ils vont vivre ! Cela prendra le temps qu’il faudra ! » Le plus terrible n’est-ce pas quand rien ne se passe, quand on ne ressent plus rien ? Le silence ? Aucun danger de tomber dans la mièvrerie avec cette peinture ! Jusque dans les tonalités, MiA exp(l)ose toute la force qui l’habite. Cette peinture jaillie du cœur, éclabousse le spectateur et le touche immanquablement. Mouche pour cette splendide violence fondatrice !

Alain Coudert
Arts Actualités Magazine